ELECTIONS UNESCO : L'Egyptien Farouk Hosni écarté de la Direction Générale

bokova.jpgIrina Bokova élue au 5° tour à l'issue d'un scrutin à rebondissements.

 

La Bulgare Irina Gueorguieva Bokova a été élue mardi directrice générale de l'Unesco à l'issue du cinquième tour d'un scrutin à rebondissements pour lequel l'Egyptien Farouk Hosni partait pourtant favori. 

 

Dépité, l'Egyptien a déclaré : "Le monde arabe et musulman n'a jamais eu la chance d'accéder à la tête de l'Unesco" Source : Reuters


Le président du conseil exécutif de l'organisation, le Béninois Joseph Olabiyi Yaï, a annoncé que la diplomate bulgare âgée de 57 ans avait été élue avec 31 voix contre 27 pour l'ancien ministre égyptien de la Culture de 71 ans, dont les détracteurs ont stigmatisé les positions anti-israéliennes.

"Je vais prendre toutes les bonnes idées, nous allons travailler ensemble", a déclaré l'élue. "Nous avons besoin d'un nouvel humanisme pour le XXIe siècle."

L'Egypte avait quand à elle la défaite amère.

"La déception ne vient pas de la qualité du gagnant, c'est qu'on ait barré la route à un courant culturel. Le monde arabe et musulman n'a jamais eu la chance d'accéder à la tête de l'Unesco alors que l'Europe l'a eue plusieurs fois", a déclaré le directeur de campagne du candidat égyptien, Nasser Hossam.

"L'avoir pendu pour deux mots, c'est génial", a-t-il ajouté en référence aux accusations qui pèsent sur Farouk Hosni.

Le choix du conseil exécutif, qui compte 58 membres, doit encore être entériné le 15 octobre prochain par la conférence générale de l'Unesco, qui réunit les 193 pays membres.

Jamais, par le passé, la conférence générale n'a invalidé la recommandation du conseil exécutif, explique-t-on à l'Unesco.

UN PROCHE DE MOUBARAK

Cinq tours de scrutin ont été nécessaires pour départager les prétendants à la succession du Japonais Koïchiro Matsuura à la tête de l'Organisation des Nations unies pour l'Education, la Science et la Culture, dont le siège se trouve à Paris.

Tous les candidats peuvent se maintenir de tour en tour sauf à l'issue du quatrième, pour lequel ne se qualifient que les deux candidats arrivés en tête.

Lundi soir, les deux candidats avaient chacun réuni 29 voix et des transferts de votes ont donc eu lieu en 24 heures.

Proche du président Hosni Moubarak, soutenu par l'Union africaine et la Ligue arabe, Farouk Hosni aurait été la première personnalité arabe à diriger l'organisation.

Sa candidature a été vivement combattue par la communauté juive. En France, elle a été dénoncée par tribunes de presse interposées par le prix Nobel de la paix Elie Wiesel, les intellectuels Claude Lanzmann et Bernard-Henri Lévy ou encore l'ancienne président du Parlement européen Simone Veil.

Candidat d'un pays dont Amnesty International épingle chaque année les pratiques répressives, notamment en matière de liberté d'expression, Farouk Hosni avait déclaré en 2008 qu'il brûlerait lui-même les livres en hébreu s'il en trouvait dans les bibliothèques égyptiennes.

Il a ensuite à plusieurs reprises regretté ses propos, prononcés dans l'enceinte du Parlement égyptien lors d'une altercation avec un député des Frères musulmans.

SOUTENU PAR LA FRANCE

Le vote est secret à l'Unesco mais des sources internes à l'organisation soulignent que, parmi les pays de l'Union européenne représentés au conseil exécutif, la France, l'Espagne, la Grèce et l'Italie avaient lors des tours précédents voté pour Farouk Hosni, en plus de pays de nombreux pays en voie de développement.

Ces quatre Etats membres sont des pays méditerranéens qui ne souhaitaient pas froisser le président égyptien Hosni Moubarak, co-président avec Nicolas Sarkozy de l'Union pour la Méditerranée (UPM), un projet cher au chef de l'Etat français malgré des débuts laborieux depuis son lancement en 2008.

Pour la France, il convenait de ménager l'Egypte, le seul pays arabe avec la Jordanie à avoir signé un accord de paix avec Israël, au moment où les grandes puissances tentent de relancer le processus de négociations israélo-palestiniennes.

"L'Egypte est un grand facteur de paix dans cette région du monde et on est bien content de l'avoir", avait déclaré le président français début septembre à quelques journalistes.

En revanche, les pays européens, dont l'Allemagne, ont soutenu la candidate bulgare, comme les Etats-Unis.

Née le 12 juillet 1952 à Sofia, mère de deux enfants, Irina Bokova, première femme à prendre la tête de l'Unesco, a été nommée en 2005 ambassadeur de Bulgarie à Paris et représentante de son pays auprès de l'Unesco.

Issue de la gauche bulgare, elle a fait une partie de ses études à l'Institut des relations internationales de Moscou et commencé sa carrière de diplomate au siège des Nations unies, à New York.

Elle a été élue députée à plusieurs reprises, nommée vice-ministre et même brièvement ministre des Affaires étrangères et candidate à la vice-présidence de la République en 1996