CHAMOISEAU : POUR FRANCISCO LE MAGNIFIQUE


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POUR FRANCISCO LE MAGNIFIQUE

(Bouladjel)

La voix-devant :

Il avait dû, c'est assuré, rencontrer les dieux de la musique

qui rythment aux obscurs les tibwa de la lave

qui balancent les trois clés de lumière dans la lumière elle-même.



La voix-derrière  :

Le souvenir des chants perdus lui avait accordé, au-delà du joli et du beau, ce qui était sa voix, une voix sans origine et sans adresse connue ; et ses traversées l'avaient relié aux forces du tambour, non comme pauvre militant ou servant d'une mystique, mais commerçant et célébrant dans toutes les harmoniques, vieux nègre à piano, fileur libre des biguines, maître d'un jazz très intime dans les jeux du clavier, soliste du plaisir, marqueur des hasards du ti-bonheur la chance, manieur des philharmoniques simples qui n'ont pas de limites, et qui connaissent le rire, qui ne craignent pas la joie, toute frime éreintée par la classe, et tout paraître éteint dessous l'autorité de la seule élégance, et ce plaisir de vivre dont la très claire intensité se trouvait au total, tout entière, et sans fin, unique et solitaire, dans l'esquisse savoureuse d'un demi pas de salsa...


La voix-devant :

Maestro,

pas d'aujourd'hui mais dès l'antan, 

vous ai vu danser comme un soleil de nuit, 

et j'ai su vous nommer dans une grage de siak.




Patrick CHAMOISEAU